robert pandraud – Qwant Recherche

– “Ouaip, le temps est venu, comme y disent les frangins, de tout raconter.
Des fois, il faut vider son S.A.C..
C’était dans les années 90 que j’ai pas connues mais qu’Véro, elle, elle a très bien subies.
– Bon, j’te la fais courte ou longue ?
J’sais pas encore.
C’est Véro qu’explique et moi, bah, j’te réexplique… Vaut mieux 2 explications plutôt qu’une car, sinon, tu comprends rien.
Voilà, t’as Véro, elle sort du commissariat, genre bâtiment central massif, un peu comme son directeur de l’époque, court sur pattes et massif aussi.
Il était tard le soir, pass’que, Véro, elle travaillait tard le soir.
– Surtout quand elle était appelée par son directeur !
Donc, voilà Véro qui sort du bâtiment…
[COLUCHE mime ma démarche ou s’efforce de la mimer, un peu comme quand il se déguisait en femme et se dandinait comme une danseuse du Lido, “les valseuses à l’abri” précise-t-il]
– Et qui voilà qu’elle voit, Véro ?
Un autre massif, tout aussi court sur pattes qui semble attendre quelqu’un.
Un peu plus loin, y’a les motards ou des motards qui semblent attendre, eux aussi, quelqu’un.
Les gars regardent, amusés, Véro arriver.
- Un p’tit gros, ouaip, un peu comme moi, je vous le CON-CE-DE, mais en moins con et en plus gros !
– Non, Véro dit qu’il était pas trop gros mais, par contre, il portait avantageusement le ventre des ronds-d’cuir qui ne bougent plus beaucoup de leur fauteuil de haut fonctionnaire.
– Sinon y tomberaient !
Pass’qu’y en a plein qui voudraient les faire tomber pour prendre la place… leur place.
– Leur fauteuil !
T’es con ou quoi ?
– Ou tu fais semblant ?
Donc, voilà Véro qui sort du bâtiment…
– Ah non, elle est déjà sortie !
Bon, alors, elle descend l’allée d’une démarche gracieuse et décidée.
– OK, j’enlève “gracieuse” pass’que, si t’as pas vu comment Véro marche, t’as jamais vu une cane se déplacer comme elle.. ou elle se déplacer comme une cane, un pas j’me penche, deux pas, j’me re-penche, la balle au centre et le cul d’poule dans la trajectoire de l’oeil du mâle.

Bon, alors, Véro descend l’allée de son allure d’allumeuse malgré elle, même qu’on a jamais compris, moi l’premier, pourquoi elle plaît aux mecs.
Et là, elle se fait héler par le massif à pattes courtes qui l’aborde ainsi :
[COLUCHE se place face à une jeune femme imaginaire, avec l’air benoît et bête qu’ont les hommes avant de vous faire un compliment encore plus idiot qu’eux]
– “Mad’m’z’elle, ce n’est pas avec lui qu’y faut sortir mais avec moi !” qu’y lui dit.
“Si vous voulez faire carrière, lui ne peut rien pour vous.
Mais moi, je saurais m’occuper de vous !”
Et le mufle d’ajouter :
– “Je m’appelle Robert PANDRAUD !” comme s’il venait de dire : – “Je suis le Président de la République française et j’ai tous les pouvoirs.”

Les motards qui assistaient à la scène étaient morts de rire mais s’efforçaient de ne pas le montrer à l’individu qui osait aborder Véro ainsi, p’t’tre bien renseigné sur ses “z’amours” malgré elle, mais mal renseignée sur c’qu’elle était.
– “Si j’avais voulu faire pute, j’serais sur le trottoir au centre ville. Et si j’voulais faire carrière, je ne l’devrais jamais aux hommes.” qu’elle lui a claqué dans la gueule, Véro.
– C’est tellement vrai qu’elle a jamais pu faire carrière dans la Police Nationale, Véro !
Faut reconnaître que les gars de la BMU, y z’ont pas pu s’empêcher d’éclater de rire devant la mine déconfite du gros plein d’soupe.
- Fallait pas, ça l’a énervassé !
– “Vous allez l’regretter !” qu’il lui a crié tandis que Véro sortait du commissariat en le plantant là, comme un con qu’il était.
Le type y trépignait sur place comme un fou ou une poupée gigogne ou encore le Zébulon du Manège Enchanté :
– “Tourni, tournicoti, tourni, tournicoton !”

Si, j’l’ai vu !
C’est Véro qui m’demande comment j’le sais piss’que j’y étais pas et qu’elle, elle est partie, sans même se retourner pour regarder çui qui l’avait prise pour une pute.
Voilà, ce fut la première et la dernière fois que Véro rencontra Robert PANDRAUD.
– Lui, par contre, y l’a jamais oubliée !
Nan, l’histoire s’arrête pas là.
Car le lendemain, y’a eu une explication de textes entre Véro et son directeur.
– C’est pas pass’qu’elle faisait des heures sup avec lui qu’y fallait que tout le monde s’imagine, en particulier n’importe quel con, qu’il pourrait lui faire faire aussi des heures sup..
D’autant plus qu’entre Véro et son directeur, rencontré presqu’en même temps que son homme de compagnie, le seul dans sa vie, ça faisait huit ans qu’il la faisait chi.r à vouloir qu’elle l’épouse !
Il avait même divorcé sans lui demander son avis et s’était servi de ce divorce pour la culpabiliser, genre :
– “C’est de ta faute si je t’aime, épouse-moi !”

Véro a épousé son homme de compagnie.
On n’abandonne pas son animal de compagnie, jamais !
Véro, elle fait partie d’une association protectrice des animaux, même des bipèdes à couilles.
En plus, de toutes façons, y voulait pas !
– Son homme de compagnie qu’elle l’abandonne..
Y menaçait de se suicider.
Et la nouvelle femme qu’y devait remplacer Véro auprès de son directeur pass’qu’elle voulait pas épouser son directeur s’était, elle, suicidée, bien que déjà mariée… Ouf !
Chasseresse à ses heures perdues et diablesse aimant le sexe, elle était parfaite.
– Sauf qu’elle s’est fusillée !
Pour de vrai…
Un jour de chasse sans gibier.
– J’ai rien oublié ?
Et pis, si son directeur avait pas décidé du coup de passer du discours amoureux aux arguments douteux, Véro, elle aurait pas été faire des heures sup dans son bureau le soir.
– Et pas pour c’que vous croyez !
Mais plutôt pour s’expliquer genre “Mégère non apprivoisée”.

C’est vrai, quand les filles de ton service viennent te trouver pour te dire que :
– “Ton cul vaut pas de l’or et qu’elles en ont marre de devoir acheter elles-mêmes leurs stylos et le papier de leur imprimante pass’que le directeur a coupé les vivres à tout le service, faut bien prendre une décision, non ? Plus de matériel pour travailler mais gare aux retards de traitement du contentieux en attente, plus de primes non plus pour le personnel.
– Vaches maigres chez les vaches et mort aux vaches ! “
Donc Véro a dû affronter l’ami qui voulait plus être un ami pass’qu’y voulait plusse…
– HUIT ANS A ATTENDRE QUE VERO LUI DISE “OUI” !
Pauvr’mec !
Finalement je le plains.
Elle lui en a fait faire de la route, des tours et des détours pass’que, pendant c’temps-là, bah, y s’passait rien, forcément :
– “Regarde la route au lieu de me regarder !”

– Et pis, t’as l’autr’con, pass’qu’y s’appelle Robert PANDRAUD, y croyait quoi ?
– Qu’Véro, elle allait l’suivre, monter dans sa superbe voiture de fonction, escortée par les gars de la BMU pour regagner au plus vite son hôtel de luxe et s’envoyer en l’air avec elle ?
Raté.
Mais ce même con, l’autr’con, le “Pandoer”, il l’a pas ratée, lui, Véro, question carrière dans la police.
Tout ça pour te dire qu’y faut comprendre pourquoi Véro, les mecs, des fois, ça la fatigue grave.
- Même que ça la gave, un peu… beaucoup, à la folie !
Pass’que, pour Véro, quand un mec lui dit qu’il l’aime, elle le croit jamais.
Au moins, pour ça, elle est lucide, même un peu voyante.
– Tu crois, toi, qu’un mec, c’est capable d’aimer vraiment une femme ?
Moi pas.
J’ai pas su aimer la mienne et j’ai oublié les autres.”

COLUCHE ajoute :
– “Oh le con qu’y m’demande : – “C’est qui, Robert PANDRAUD ?!”
C’est la “bande à Baader” qu’a foutu par-terre la police nationale avec son SAC, le SAC à PASQUA.”
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Les secrets de Robert Pandraud, patron de la “Grande Maison”
Ce portrait de Robert Pandraud est paru dans Le Monde daté du 5 mars 1987.
Par Alain Rollat , Philippe Boggio et Philippe Boggio et Alain Rollat
Publié le 18 février 2010 à 11h01 –
Mis à jour le 18 février 2010 à 11h01
Ce portrait de Robert Pandraud est paru dans Le Monde daté du 5 mars 1987.
Robert Pandraud reste un homme indéchiffrable. Peut-être, tout simplement, parce qu’on ne devient pas le “premier flic de France”, vivante mémoire de tant de secrets embarrassants, sans maitriser à la perfection l’art du camouflage.
Mais, de même que la seiche se protège en projetant des écrans d’encre, il arrive que certains caractères se complaisent dans le flou par précaution d’auto-défense autant que par calcul. Surtout quand la vie leur a appris le sens du relatif, la valeur du doute, l’utilité du pragmatisme sans illusion ni conviction.
Il y a du misanthrope chez Robert Pandraud. C’est cette distance vis-à-vis de tous les engagements qui a fait de cet “agnostique libéral “ _ selon l’expression d’un de ses proches _ un parfait commis de l’Etat sans… états d’âme, cette échine souple sans être docile, successivement mise au service des gouvernements pompidoliens, giscardiens et chiraquiens, avec une brève cohabitation involontaire avec les socialistes.
Un homme plus lucide que beaucoup d’autres qui avoue sa soumission aux circonstances : ” Beaucoup d’événements n’ont pas de logique. C’est l’histoire qui finit par donner une motivation à ce que vous n’avez souvent décidé que par réflexe. Et après tout, ce n’est pas une mauvaise formule. “
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