J’aurais dû écrire cet article depuis au moins quatre ou cinq jours.

Je fulminais intérieurement contre tous ces croque-morts qui organisaient des cérémonies mortuaires, eux-mêmes morts, ces incroyants de la Vie, accompagnant vers la mort des morts plus vivants qu’eux-mêmes (pléonasme voulu).
Je me rappelais aussi cette ambiance pesante comme une présence malfaisante qui planait dans l‘air mais tardait à se manifester et ces avertissements sur un drame à venir, sans que je ne puisse rien y faire, hélas.
Dans ma tête revenaient sans cesse ces trois mots :
– « professeur, histoire, mort ! »

L’Ange de la Mort frappait à la porte et voulait une tête, c’est le cas de le dire, hélas, la tête d’un enseignant.
C’était en France, c’était trop vague.
J’étais malade d’un étrange malaise et nul ne pouvait intervenir avant que l’événement n’advienne.
D’ordinaire, j’aurais écrit immédiatement sur mon blog « Deu vos guard » ce que j’avais reçu tant la répétition laconique de ces trois mots était affolante et suffocante pour moi, frappée du sceau de la Mort.
- Sauf que j’ai voulu comprendre, interpréter, rechercher des raisons logiques dans l’actualité médiatique du moment
- en oubliant que le présent est rarement le futur.
Et puis, sur les trois mots, deux mots me frappaient au coeur :
– « professeur » et « histoire ».

Donc j’ai cédé à une sorte de panique et quand on panique, on ne réfléchit pas, on agit animalement dans un réflexe de protection tribale, on ferme la porte à toute raison :
– Lui d’abord, l’avertir, mais de quoi ?
Du coup, j’ai oublié complètement mon premier devoir qui est le motif pour lequel mes « visiteurs » m’accordent leur confiance, l’obligation d’écrire ce que je « reçois », peu importe comment moi, je voudrais l’interpréter, précisément sur ce blog.
Je m’en suis beaucoup voulu, sincèrement.
Cependant j’ai découvert aussi, à mon corps défendant et à cause d’un coeur dépendant, que je n’étais qu’une femme et que mon instinct de survie me poussait d’abord à protéger ceux que j’aime et surtout celui que j’aime.
– Quel rapport avec l’instinct de survie ?
- Une femme amoureuse peut-elle imaginer sa vie sans lui, l’homme qu’elle aime ?

Si nous avions navigué ensemble sur le Titanic, je n‘aurais sans doute pas respecté l’injonction secouriste :
– « les femmes et les enfants d’abord ! »
J’aurais supplié mon homme de se déguiser en femme, bien sûr, avec mes vêtements, de se travestir pour ne pas le perdre.
Sinon j’aurais menacé de rester avec lui, pour mourir avec lui, quand sombrerait le Titanic, moi-même travestie en homme.
Samuel Paty me renvoie l’image d’une France qui sombre tel le Titanic.
L’enseignant était déjà présent quand le Général de Gaulle m’a demandé en urgence de republier le post du 25 avril 2017 sur le « naufrageur » français, Emmanuel Macron, nauséabond Comte de Lautréamont.

Samuel Paty me retourne la question :
– « Qu’allons-nous faire, qu’allez-vous faire, vous qui foncez tous sur l’iceberg de l’obscurantisme religieux, sans vouloir changer de cap ? »
Moi :
– « Mourir en nous aimant !? »
Lui :
– « C’est de l’égoïsme, un luxe de pays riche. »

Je n’ai pas avec Samuel Paty une communication fluide.
J’ignore pourquoi.
Par contre je l’ai très bien vu et j’ai été surprise par son air incroyablement serein, alors que cette mort atroce, la décapitation à vif d’un être humain par un autre être humain, aurait dû provoquer en lui au moins un sentiment d’injustice, sinon une colère humainement motivée.
Ce qu’il ma expliqué, c’est qu’« avant la colère, il a surtout ressenti une souffrance atroce et qu’il ne souhaite à personne d’autre que lui de mourir dans ces conditions de torture barbare. »
Samuel Paty est là, stable, sans vague émotionnelle qui le submerge, ni de haine, ni d’amour,
– « haine, amour, sentiments instrumentalisés par une caste en place qui se fiche de ses enseignants comme de sa première chemise » dit-il.

Je ne dirais pas qu’il regarde, amusé, les commémorations se succéder les unes après les autres tandis que s’enchaînent les foules au slogan suicidaire :
– « Vous n’aurez pas ma haine ! »
- « pour faire oublier ce que lui n’oubliera jamais :
– que son administration l’avait lâché
- et qu’il s’est fait lyncher par les médias bien-pensants,
- les mêmes médias qui l’encensent aujourd’hui et en font une figure de « martyr laïque ». »
Si, immédiatement, l’adolescente délatrice avait été convoquée pour s’expliquer et avait été sanctionnée publiquement, au moins dans son collège, à cause de l’énormité des mensonges inventés par cette gamine perturbée qu’il était facile de confondre par une confrontation avec lui, lui qui aurait dû être considéré comme le seul représentant institutionnel de l’autorité légitime du savoir éducationnel, Samuel Paty serait encore en vie :
- Il en est convaincu !

– « Il n’y a pas dix chemins à trouver.
- Il n’y en a qu’un seul, celui de la vérité ! » assène-t-il avec force.
Si Samuel Paty est serein, c’est parce que tous ces mensonges institutionnels visant à couvrir une population inculte qu’on nourrit sans l’éduquer et qu’on laisse s’enfermer dans un ghetto de la haine qui engendre des comportements criminels, tous ces mensonges institutionnels vont exploser comme des bombes à la gueule de nos dirigeants.
J’essaie de transcrire au mieux ce que je reçois, sans remplacer ses mots par mes mots lorsqu’il y a des trous dans la communication.
Il sourit.
« L’absence d’exigence pédagogique a conduit à ce désastre éducationnel. », ajoute-t-il.
- Samuel Paty sait que c’est un marronnier que de me le faire écrire.
C’est justement ce qu’il reproche aux médias occidentaux de s’être servis avec récurrence de faits divers sporadiques mais déjà symptomatiques d’un mal-être civilisationnel dangereux pour couvrir des crises économiques et faire porter le chapeau à des peuples non convertis à la religion laïque des Droits de l’Homme.

– « Les instituteurs, les anciens maîtres d’école devenus les nouveaux professeurs d’école, se sont reniés en refusant le combat laïque des Hussards Noirs de la République contre l’obscurantisme religieux.
- C’est à l’enfance qu’il faut cueillir la naïveté et l’éradiquer !
Le Père Noël n’existe pas pour les Muzzs.
- Donc il n’existe sur cette terre que ce qui est prouvable par la science !
Et Dieu lui-même ne s’en portera que mieux. »
Fin de l’interview de Samuel Paty… même s’il reste avec moi, m’apportant inexplicablement et paradoxalement sa force sereine, (ne surtout pas écrire « force tranquille » ! en référence à un slogan politique, vide de sens) cette sérénité due au fait que, peut-être, il sait qu’il n’a fait que son devoir d’enseignant et qu’il n’a rien, lui, à se reprocher.
Lorsque monte en moi un dégoût profond devant l’hypocrisie académique et endémique de l’Éducation Nationale, – « la débandade totale » s’amuse-t-il à corriger -, c’est lui, Samuel Paty qui m’envoie un étonnant sentiment de réconfort et me rassure.

C’est une pensée non verbale, une force absolue qu’il veut que je ressente, une certitude confiante que je ne comprends pas et sur laquelle, pour l’instant, il ne veut rien dire.
– Merci, Samuel, d’être fort pour nous qui sommes faibles !
– Merci, Samuel, d’avoir été le plus fort, toi qui as vaincu la mort « contre ceux qui détestent la vie » ! (ajout de Samuel Paty)