
C’est ainsi que certains Universitaires appellent des études comparatives historiques, sociologiques ou économiques menées à des niveaux différents, jargon emprunté aux cartographes en géographie.
Tout s’interpénètre, les connaissances, les concepts et les spécialités universitaires.
Cependant, la philosophe que je suis par nature ignore si ontologiquement c’est de l‘interdisciplinarité que de singer les concepts d’une autre science humaine dite exacte ou pas pour paraître plus savant-e.
Quoiqu’il en soit, comme l’homme descend du singe, j’ai decidé de singer aussi ce concept de jeux d’échelle avec de vraies échelles concrétisant des grandeurs physiologiques :
- hein que oui ?!
C’était à la fin de l’hiver, avant que la sève ne monte trop… chez les végétaux.
Imaginez une femme qui, dans un jardin d’ornement, s’apprête à élaguer l’arbre central qui surplombe le toit de sa maison.
- Jardin d’Eve mais sans pommier, l’arbre du mal et du bien étant remplacé par un olivier, l’arbre de la paix.
Enfin, il paraît que c’est l’arbre de la paix !
J’avais fini de maltraiter mon citronnier, réticent à une coupe “crew cut”, et je m’apprêtais à couper mon olivier à la mode iroquoise quand j’entendis :
- “Véro, tu vas pas, toute seule, faire l’élagage de ton olivier ?”
Accroupie, en équilibre sur la fourche centrale de mon olivier :
- “Et pourquoi pas ?”
- “Attends, j’arrive. Surtout ne bouge pas, tu pourrais tomber. J’ai une échelle !”

L’instinct protecteur et primaire des mâles…
- Rien à faire, à chaque fois, il faut qu’ils viennent aider… les voisines !
J’ai tenu, allez, un quart d’heure max sans être “protégée”, pour ne pas écrire, derangée :
- un exploit, cette fois-ci !
Mon voisin, si prévenant et toujours charmant, revient avec une triple échelle qui devrait m’éviter d’avoir à escalader mon olivier pour monter sur le toit de ma maison, inconsciente que je suis, pour couper les branches qui surplombent tuiles et gouttières.
Fataliste, à cause d’expériences précédentes accumulées, je sais qu’il est inutile de refuser l’aide d’un mâle, sauf à vouloir se fâcher avec lui.
Or se fâcher avec ses voisins est vivement déconseillé surtout quand on est nul-le en bricolage et en jardinage.
- Je débute, quoi !

Pas d’autre choix que de redescendre de mon arbre en m’aidant d’un escabeau-maison que j’avais posé à côté du tronc, en cas de perte d’équilibre et de visite impromptue.
Et puis, c’est toujours mieux, un escabeau, pour grimper au ciel que les bras d’un voisin… marié !
Même et surtout s’il est beau gosse.
- “J’ai mal au genou, j’ai fait un faux mouvement hier. Tu monteras sur l’échelle et, moi, je te la tiendrai pour qu’elle soit stable.”
Oui, je sais, il paraît que j’ai un beau Q, à défaut d’avoir un QI à la hauteur de mes modestes ambitions de ménagère.
- Dans quel état, j’erre ?
- Oki, j’exagère.

- “Mais tu coupes les branches avec ce sécateur ? Il est tout rouillé !”
- M’énerve… à vouloir tout régenter comme tous les autres mecs.
- “Surtout ne bouge pas ! Je vais chercher ma scie électrique.”
Moi, je suis zen et je m’efforce de le rester.
J’ai horreur des scies électriques genre tronçonneuses.
Bah oui, ça fait du bruit.
Or je fuis le bruit.
Moi, j’aime le silence dans un jardin.
- Sinon à quoi ça sert de jardiner si ce n’est pas pour méditer ?
- Cultiver son jardin, mon rêve !
- Dans le silence, un silence quasi monacal.
Mais les hommes, ils aiment tout ce qui est électrique, électronique, bruyant, salissant et “excitant” pour eux.

- A croire que, plus ils font de bruit, plus ils sont heureux, nos bonshommes !
C’est comme les moteurs de voitures ou pire, les moteurs de motos qu’ils font vrombir.
Je suppose que se faire entendre des voisins, c’est tout pareil qu’une forme de marquage de territoire, un marquage viril effectué par le mâle de notre espèce qui a renoncé, à l’âge adulte, au jeu de celui qui faisait pipi le plus loin possible avec son zizi.
[Et moi, je faisais l’arbitre, garcon manqué toujours avec les garçons.
-Eh oh, j’avais huit ans !]
- Plus les hommes font du bruit, plus ils impressionnent leurs rivaux !
C’est génétique, c’est dans leur ADN, comme les gorilles qui se frappent la poitrine à coups de poings :
- c’est ça, l’évolution de l’espèce humaine !
Parfois ça passe par un retour aux origines, une sorte de descente le long de l’arbre généalogique.

Et là, songeuse, pensive, interrogative, j’entends une voix qui interpelle :
- “Marc, t’es là ?”
[prénom changé pour la paix des ménages et du quartier dans lequel je vis]
- “Oh, excuse-moi, Véro, je croyais que Marc était avec toi.”
- “Non, il est parti chercher une scie électrique.”
- “Ah, mais tu élagues tes arbres ?”
J’ai failli répondre que :
- “Non, je me faisais une nouvelle coupe de cheveux avec un sécateur dernier cri.”
- Au secours !
Serge ajoute, tout de suite :
- “Oh la, ça va pas, c’est quoi cet escabeau ? Tu vas te blesser !”
Puis, protecteur, comme tous les mâles, n’est-ce pas ?
- “Attends, je vais te chercher mon échelle. Elle est plus grande et plus dure que celle de Marc ! Tu seras mieux dessus. ”
Ah non, alors, ça va pas recommencer !?

- Qu’est-ce qu’ils ont, tous les mecs, avec leur échelle ?
- C’est phallique ou quoi ?
Je m’entends lui répondre :
- “Non, regarde, l’échelle de Marc est triple. Elle monte jusqu’à plus de 3,50 m.”
C’est à ce moment-là que Marc revient et s’exclame :
- “Mais qu’est-ce que tu fais là, Serge ? Véro, elle aime pas qu’on l’aide. Elle veut tout faire toute seule, pour apprendre à se débrouiller sans mec.”
- Oui, j’aimerais bien apprendre à me débrouiller sans mec.
Encore faudrait-il que les mecs acceptent que je me débrouille sans eux !

P.S. : J’ai réussi à ne pas grimper à l’échelle !
Donc à ne pas payer de ma personne.
C’est Serge qui a escaladé l’échelle et qui est monté sur le toit pour couper les longues branches de l’olivier.
- Allez savoir pourquoi, bizarrement, Marc n’a pas eu besoin de lui tenir l’échelle, à Serge !
